Que Dieu me pardonne et me guide pour tout ce que j’aurais pu mal interpréter dans cette étude et ailleurs. Qu’Il puisse nous guider vers une meilleure compréhension de Sa révélation afin que nous puissions nous purifier et accroître notre savoir.

وَالسَّارِقُ وَالسَّارِقَةُ فَاقْطَعُوا أَيْدِيَهُمَا جَزَاءً
بِمَا كَسَبَا نَكَالًا مِّنَ اللَّهِ وَاللَّهُ عَزِيزٌ حَكِيمٌ
(5:38) Et [pour ce qui est] du voleur et de la voleuse, faïqta’ou (coupez ?) leurs mains en rétribution équivalente à ce qu’ils ont acquis : [Voici] un châtiment exemplaire de la part de Dieu ! Dieu est Puissant et Sage.
Que dit vraiment le coran en ce qui concerne le châtiment pour le voleur ? Faut-il amputer la main systématiquement ou dans certains selon les interprétations divergentes de l’islam sunnite et chiite, ou l’expression littérale « couper les mains » s’agit-elle en réalité d’une expression typique figurée relative à l’emploi imagé du verbe « qouti’a » (قُطِعَ) à la forme 1 en conjonction avec le mot « main », et dont la signification est toute différente ?
Nous allons dans un premier temps rappeler le contexte de la loi coranique en citant la loi du talion, et citer à titre de réflexion et de comparaison le fait que même un meurtrier peut être pardonné en islam. Nous expliquerons ensuite la définition du verbe « qouti’a » (couper ?) et ses différents emplois figuratifs dans l’ensemble du coran, ce qui sera suivi par une analyse de plusieurs usages du mot « main », dont nous prouverons qu’ils sont très majoritairement allégoriques ou imagés dans le coran. Nous élargirons après le débat d’un point de vue historique en citant la sourate 12 et l’histoire du frère de Joseph (Benjamin), accusé de vol au royaume d’Egypte, et établirons le lien avec la loi biblique et coranique. Nous analyserons par la suite le verset 5:38 qui ne peut être correctement compris que dans le contexte precis de la sourate 5, et prouverons pourquoi il n’est pas possible d’un point de vue grammatical que le sens du verbe « qouti’a » à la forme 1 en 5:38 soit de « couper » dans le sens littéral du terme pour des raisons liées à l’emploi du verbe « couper » (qata’a) à la forme 2 en 5:33. Nous citerons enfin plusieurs hadiths très choquants (Bukhari, Muslim) soit disant « sahih » (forts) ayant trait à la sentence pour vol. Ces derniers nous permettront de visualiser l’étonnant décalage entre la vraie sentence coranique et la loi sunnite.
Sommaire
1. La loi du talion
2. Le pardon en cas de meurtre
3. Définitions : La racine qata’a, le verbe qouti’a (5:38, forme 1), et le verbe Qata’a (5:33, forme 2)
4. Les versets coraniques où le verbe « qouti’a » (قُطِعَ) est employé
5. Les expressions ayant trait aux « mains » sont souvent figurées ou imagées dans le coran une fois combinées avec les verbes ou expressions auxquelles elles se rapportent
6. L’une des clefs coraniques pour établir le contexte de la sentence du voleur dans l’histoire de la révélation: L’histoire du frère de Joseph (Benjamin), accusé de vol au royaume d’Egypte, et comparaison avec la loi de la thora
7. Le châtiment coranique en cas de vol
7.1 Le verset 5:38 et son contexte
7.2 La différence contextuelle et le contraste significatif entre les verbes qouti’a (5:38, forme 1) et Qata’a (5:33, forme 2)
7.3 Analyse précise du verset 5:38
7.4 5:39-40 : Le pardon fait suite à la sentence
8. La corruption des hadiths
Conclusion
1. La loi du talion
وَكَتَبْنَا عَلَيْهِمْ فِيهَا أَنَّ النَّفْسَ بِالنَّفْسِ وَالْعَيْنَ بِالْعَيْنِ وَالْأَنفَ بِالْأَنفِ
وَالْأُذُنَ بِالْأُذُنِ وَالسِّنَّ بِالسِّنِّ وَالْجُرُوحَ قِصَاصٌ فَمَن تَصَدَّقَ بِهِ
فَهُوَ كَفَّارَةٌ لَّهُ وَمَن لَّمْ يَحْكُم بِمَا أَنزَلَ اللَّهُ فَأُولَٰئِكَ هُمُ الظَّالِمُونَ
(5:45) Et Nous y avons ordonné à leur égard : L’âme en échange de l’âme, œil pour œil, nez pour nez, oreille pour oreille, dent pour dent, et la loi du talion s’applique aux blessures ; mais quiconque fait preuve de charité au lieu de cela, il s’agit alors d’une expiation en sa faveur. Et quiconque ne juge pas en fonction de ce que Dieu a révélé : Tels sont ceux qui sont qui sont malfaisants.
الشَّهْرُ الْحَرَامُ بِالشَّهْرِ الْحَرَامِ وَالْحُرُمَاتُ
قِصَاصٌ فَمَنِ اعْتَدَىٰ عَلَيْكُمْ فَاعْتَدُوا عَلَيْهِ بِمِثْلِ مَا
اعْتَدَىٰ عَلَيْكُمْ وَاتَّقُوا اللَّهَ وَاعْلَمُوا أَنَّ اللَّهَ مَعَ الْمُتَّقِينَ
(2:194) Les mois sacrés sont les mois sacrés : A toute transgression correspond une peine. Ainsi, quiconque vous fait du tort, alors ripostez envers lui d’une façon équivalente au tort qu’il vous a causé. Craignez Dieu ! Et sachez que Dieu est du coté de ceux qui le craignent.
ادْعُ إِلَىٰ سَبِيلِ رَبِّكَ بِالْحِكْمَةِ وَالْمَوْعِظَةِ الْحَسَنَةِ
وَجَادِلْهُم بِالَّتِي هِيَ أَحْسَنُ إِنَّ رَبَّكَ هُوَ أَعْلَمُ
بِمَن ضَلَّ عَن سَبِيلِهِ وَهُوَ أَعْلَمُ بِالْمُهْتَدِينَ
(16:125) Invite dans la voie de ton Seigneur avec sagesse et discernement. Engage un débat sur ce qui importe. En vérité, ton Seigneur sait qui s’égare de son chemin et il sait qui est guidé.
وَإِنْ عَاقَبْتُمْ فَعَاقِبُوا بِمِثْلِ مَا عُوقِبْتُم بِهِ
وَلَئِن صَبَرْتُمْ لَهُوَ خَيْرٌ لِّلصَّابِرِينَ
(16:126) Et si vous ripostez, alors ripostez de façon équivalente à la façon dont vous avez été affligés, mais si vous faites preuve de patience, c’est [bien] meilleur d’être patient.
وَجَزَاءُ سَيِّئَةٍ سَيِّئَةٌ مِّثْلُهَا فَمَنْ عَفَا وَأَصْلَحَ
فَأَجْرُهُ عَلَى اللَّهِ إِنَّهُ لَا يُحِبُّ الظَّالِمِينَ
(42:40) La récompense pour un mal est un mal équivalent. Mais quiconque pardonne et se réconcilie, sa récompense est auprès de Dieu. En vérité, Il n’aime pas les gens malfaisants.
Dieu a établi la loi du talion comme fondation du système judiciaire. Il s’agit d’établir un système de peines par équivalence. Cependant, Dieu rayonne d’amour et les versets ci-dessus nous montrent qu’Il encourage le pardon et la réconciliation au lieu des représailles, qu’Il récompense par l’expiation de nos péchés.
2. Le pardon en cas de meurtre
Dieu a décrété que tuer une personne revient à tuer toute la race humaine :
مِنْ أَجْلِ ذَٰلِكَ كَتَبْنَا عَلَىٰ بَنِي إِسْرَائِيلَ أَنَّهُ مَن قَتَلَ نَفْسًا
بِغَيْرِ نَفْسٍ أَوْ فَسَادٍ فِي الْأَرْضِ فَكَأَنَّمَا قَتَلَ النَّاسَ جَمِيعًا
وَمَنْ أَحْيَاهَا فَكَأَنَّمَا أَحْيَا النَّاسَ جَمِيعًا وَلَقَدْ جَاءَتْهُمْ رُسُلُنَا
بِالْبَيِّنَاتِ ثُمَّ إِنَّ كَثِيرًا مِّنْهُم بَعْدَ ذَٰلِكَ فِي الْأَرْضِ لَمُسْرِفُونَ
(5:32) Depuis lors, nous avons prescrit aux enfants d’Israël que quiconque tue une personne, à moins qu’elle ne soit coupable de meurtre ou sème la corruption sur la terre, équivaut à tuer l’humanité toute entière. Et quiconque sauve une âme, c’est comme s’il sauvait l’humanité toute entière. En vérité, nos messagers leur sont parvenus avec des preuves (irréfutables). Mais beaucoup d’entre eux ont par la suite (décidé) de commettre le mal sur terre.
Une seule vie humaine a autant de valeur que l’humanité toute entière, et c’est pour cela que même lorsqu’une vie a été perdue injustement, Dieu ouvre dans certains cas la porte pour que d’autres ne soient pas également gâchées :
يَا أَيُّهَا الَّذِينَ آمَنُوا كُتِبَ عَلَيْكُمُ الْقِصَاصُ فِي الْقَتْلَى الْحُرُّ
بِالْحُرِّ وَالْعَبْدُ بِالْعَبْدِ وَالْأُنثَىٰ بِالْأُنثَىٰ فَمَنْ عُفِيَ لَهُ مِنْ أَخِيهِ
شَيْءٌ فَاتِّبَاعٌ بِالْمَعْرُوفِ وَأَدَاءٌ إِلَيْهِ بِإِحْسَانٍ ذَٰلِكَ تَخْفِيفٌ
مِّن رَّبِّكُمْ وَرَحْمَةٌ فَمَنِ اعْتَدَىٰ بَعْدَ ذَٰلِكَ فَلَهُ عَذَابٌ أَلِيمٌ
(2:178) Ô vous qui croyez, la loi du talion vous été prescrite en matière de meurtres : L’homme libre en échange de l’homme libre, l’esclave en échange de l’esclave, la femme en échange de la femme ; mais quiconque obtient le pardon de la part de son frère [le frère du défunt] pour un cas particulier, un paiement approprié à son intention doit alors s’ensuivre dans la civilité ; c’est une concession de la part de votre seigneur et une miséricorde. Mais quiconque transgresse après cela encourra un châtiment douloureux.
Dieu pardonne l’homicide involontaire (4:92) et permet même qu’un meurtrier soit exonéré de la peine capitale si la famille du défunt accepte de pardonner en échange d’une compensation financière appropriée. Compte tenu de ce fait, est-il juste de couper la main d’une personne qui volerait un œuf, ou même quelque chose de beaucoup plus substantiel ? Le but ultime de cet article est de prouver que la justice coranique est profondément juste, et nous répondrons à cette question plus tard à la lumière du coran et pas simplement de notre cœur.
3. Définitions : La racine qata’a, le verbe qouti’a (5:38, forme 1), et le verbe Qata’a (5:33, forme 2)
Les verbes qouti’a (قُطِعَ, 5:38, forme 1 = couper ?) et Qata’a (قَطَّعَ, 5:33, forme 2 = couper/amputer) partagent la même racine et apparaissent tous deux dans le contexte des versets ayant trait au châtiment du voleur. L’alternance significative entre ces deux verbes est absolument cruciale pour saisir la signification réelle de la loi en matière de vol en 5:38, comme nous l’étudierons en détail dans la section 7.
– La racine qata’a (قطع) signifie « couper », « séparer », « entraver », « tourner », « diviser », « supprimer », « décider », « traverser », « infester », « abolir », « déchirer », « intercepter ».
– Le verbe « qouti’a » (قُطِعَ) en 5:38 est la forme 1 de cette racine et nous verrons que, selon le contexte, il signifie « couper », « séparer », « isoler », « annihiler », « traverser », « gravir », « prélever ». L’emploi de ce verbe est surtout imagé dans le coran, ce auquel nous reviendrons.
– Le verbe Qata’a (قَطَّعَ = verbe à la forme 2) signifie « Couper », « couper en morceaux », « diviser », « disperser séparément », « trancher », « amputer », « taillader ». L’emploi de ce verbe est surtout littéral (plutôt qu’imagé) dans le coran.
4. Les versets coraniques où le verbe « qouti’a » (قُطِعَ = couper ?) est employé
Nous allons ici nous poser la question si le verbe « qouti’a » (قُطِعَ = forme 1) qui apparaît dans le verset du châtiment pour vol (5:38), signifie systématiquement « couper » ou « amputer » au sens propre du terme ou s’il a d’autres significations dans le coran. Ce verbe apparaît exactement 11 fois dans le coran en plus de 5:38 (12 fois au total):
الَّذِينَ يَنقُضُونَ عَهْدَ اللَّهِ مِن بَعْدِ مِيثَاقِهِ وَيَقْطَعُونَ مَا أَمَرَ اللَّهُ
بِهِ أَن يُوصَلَ وَيُفْسِدُونَ فِي الْأَرْضِ أُولَٰئِكَ هُمُ الْخَاسِرُونَ
(2:27) Ceux qui enfreignent le pacte de Dieu après l’avoir scellé, et séparent ce que Dieu a ordonné de joindre, et qui sèment la corruption sur terre : Tels sont ceux qui sont les perdants.
لِيَقْطَعَ طَرَفًا مِّنَ الَّذِينَ كَفَرُوا أَوْ يَكْبِتَهُمْ فَيَنقَلِبُوا خَائِبِينَ
(3:127) Afin qu’Il puisse isoler/séparer une partie de ceux qui mécroient ou les annihiler, afin qu’ils battent en retraite, [couverts] d’échec.
فَقُطِعَ دَابِرُ الْقَوْمِ الَّذِينَ ظَلَمُوا وَالْحَمْدُ لِلَّهِ رَبِّ الْعَالَمِينَ
(6:45) Ainsi furent annihilés le reste du peuple malfaisant ; louange à Dieu, Seigneur de l’univers.
فَأَنجَيْنَاهُ وَالَّذِينَ مَعَهُ بِرَحْمَةٍ مِّنَّا وَقَطَعْنَا
دَابِرَ الَّذِينَ كَذَّبُوا بِآيَاتِنَا وَمَا كَانُوا مُؤْمِنِينَ
(7:72) Ainsi, Nous l’avons sauvé (Noé), ainsi que ceux en sa compagnie, par miséricorde de notre part, et Nous avons annihilés (lit. « coupé les racines ») ceux qui ont rejeté Nos signes ; ils n’étaient point croyants.
وَإِذْ يَعِدُكُمُ اللَّهُ إِحْدَى الطَّائِفَتَيْنِ أَنَّهَا لَكُمْ وَتَوَدُّونَ
أَنَّ غَيْرَ ذَاتِ الشَّوْكَةِ تَكُونُ لَكُمْ وَيُرِيدُ اللَّهُ
أَن يُحِقَّ الْحَقَّ بِكَلِمَاتِهِ وَيَقْطَعَ دَابِرَ الْكَافِرِينَ
(8:7) Et quand Dieu vous a promis que l’un des deux groupes vous serait destiné, vous avez espéré que ce soit autre que le groupe armé qui vous soit destiné ; mais Dieu a voulu établir la vérité avec Ses paroles, et annihiler (lit. « couper les racines ») les mécréants.
وَلَا يُنفِقُونَ نَفَقَةً صَغِيرَةً وَلَا كَبِيرَةً وَلَا يَقْطَعُونَ
وَادِيًا إِلَّا كُتِبَ لَهُمْ لِيَجْزِيَهُمُ اللَّهُ أَحْسَنَ مَا كَانُوا يَعْمَلُونَ
(9:121) Et ils ne font aucune dépense, petite ou grande, ni ne traversent de vallée, sans que cela ne soit consigné en leur [nom], afin que Dieu puisse les récompenser [en fonction] du meilleur de ce qu’ils faisaient.
وَالَّذِينَ يَنقُضُونَ عَهْدَ اللَّهِ مِن بَعْدِ مِيثَاقِهِ
وَيَقْطَعُونَ مَا أَمَرَ اللَّهُ بِهِ أَن يُوصَلَ وَيُفْسِدُونَ
فِي الْأَرْضِ أُولَٰئِكَ لَهُمُ اللَّعْنَةُ وَلَهُمْ سُوءُ الدَّارِ
(13:25) [par contre], ceux qui enfreignent le pacte de Dieu après l’avoir scellé, et séparent ce que Dieu a ordonné de joindre, et qui sèment la corruption sur terre, tels sont ceux qui encourent la malédiction, et il leur sera assigné une demeure maléfique.
مَن كَانَ يَظُنُّ أَن لَّن يَنصُرَهُ اللَّهُ فِي الدُّنْيَا وَالْآخِرَةِ فَلْيَمْدُدْ
بِسَبَبٍ إِلَى السَّمَاءِ ثُمَّ لْيَقْطَعْ فَلْيَنظُرْ هَلْ يُذْهِبَنَّ كَيْدُهُ مَا يَغِيظُ
(22:15) Quiconque pense que Dieu ne lui prêtera pas secours dans ce monde et dans l’au delà, alors qu’il étende un lien vers le ciel et qu’il le gravisse (c’est à dire le « traverse ») ensuite, et qu’il voie si ce stratagème le débarrassera de ce qui le tourmente.
أَئِنَّكُمْ لَتَأْتُونَ الرِّجَالَ وَتَقْطَعُونَ السَّبِيلَ وَتَأْتُونَ
فِي نَادِيكُمُ الْمُنكَرَ فَمَا كَانَ جَوَابَ قَوْمِهِ إِلَّا أَن
قَالُوا ائْتِنَا بِعَذَابِ اللَّهِ إِن كُنتَ مِنَ الصَّادِقِينَ
(29:29) Ne vous approchez-vous pas des hommes (dans une intention charnelle prohibée) et n’anéantissez-vous pas le voyageur ?! Ne commettez-vous pas le mal dans vos assemblées ?! Et la réponse de son peuple (le peuple de Lot) ne fut autre que de dire : « Fais fondre le châtiment de Dieu sur nous si tu es véridique ! ».
مَا قَطَعْتُم مِّن لِّينَةٍ أَوْ تَرَكْتُمُوهَا قَائِمَةً
عَلَىٰ أُصُولِهَا فَبِإِذْنِ اللَّهِ وَلِيُخْزِيَ الْفَاسِقِينَ
(59:5) Que vous coupiez une partie des palmiers ou que vous les laissiez debout sur leurs racines dépend de la volonté de Dieu ; et Il pourrait bien humilier les transgresseurs.
ثُمَّ لَقَطَعْنَا مِنْهُ الْوَتِينَ
(69:46) Ensuite, Nous Lui aurions certainement tranché l’aorte.
Sur les 11 versets étudiés, seuls deux emplois du verbe « qouti’a » (قُطِعَ, forme 1) ont le sens de « couper » ou « trancher » (les deux derniers), alors que les neuf autres signifient « séparer », « isoler », « annihiler », « traverser », « gravir ». Autrement dit, dans presque 82% des cas (9 fois sur les 11 versets ci-dessus), le verbe « qouti’a » a un sens figuré ou imagé et ne signifie pas littéralement « couper » dans le sens de « trancher » quelque chose. Par exemple, lorsqu’il est question de « couper les racines » des gens malfaisants (7:72, 7:8) pour traduire littéralement, aucune « racine » n’est « coupée » au sens propre du terme, et il s’agit de les « annihiler », ou de les évincer de telle sorte qu’aucun incrédule ne vivra plus sur les terres qu’ils occupaient. En 9:121, il ne s’agit bien sûr pas de « couper » une vallée dans le sens de la « trancher », mais simplement de la « traverser ».
Cette section est donc une première étape préliminaire dans notre analyse qui nous permet de constater que c’est le contexte et la signification du verset, et lorsque nécessaire sa signification élargie au contexte général du coran, qui nous permettent de comprendre si on doit par exemple « couper » ou « trancher » quelque chose, ou au contraire « couper » de façon imagée, ou bien encore s’orienter vers une définition assez différente afin de saisir et traduire le sens réel que Dieu a insufflé à un verset.
5. Les expressions ayant trait aux « mains » sont souvent figurées ou imagées dans le coran une fois combinées avec les verbes ou expressions auxquelles elles se rapportent
J’ai personnellement lu et étudié très attentivement tous les versets coraniques où les 120 mots « main » apparaissent (singulier ou pluriel), et j’ai calculé en faisant un tableau que 76 fois sur 120, l’emploi du mot « main » est figuré et ne signifie pas, ou pas forcement, le mot « main » à proprement parler. Autrement dit, dans 63% des cas, le mot « main » fait partie d’expressions imagées qui réfèrent par exemple à des personnes, des actions, le fait de posséder quelque chose, des prépositions, etc…, et il ne réfère clairement et spécifiquement à une ou plusieurs « mains » que dans environ 37% des cas.
Nous allons dans cette section traduire très littéralement un certain nombre d’expressions coraniques qui utilisent le mot « main », que nous retraduirons ensuite simultanément car les traductions seraient autrement souvent extrêmement maladroites, voire incompréhensibles du fait de leurs sens très imagé. Ceci nous permettra d’illustrer à quel point les versets du coran utilisent dans presque deux tiers des cas les mains de façon figurée, imagée ou allégorique, et non pas des mains physiques, ce qui sera l’un des éléments qui nous permettra plus tard de mieux comprendre l’expression utilisée en 5:38 au sujet des mains des voleurs.
(2:66) « …une punition exemplaire pour ceux en face de leurs mains » : La phrase signifie « une punition exemplaire pour ceux qui étaient en leur présence », c’est-à-dire « une punition exemplaire pour leurs contemporains » : « Les mains » ne représentent ici pas des mains en tant que telles mais des personnes dans leur totalité (en l’occurrence les contemporains ce ceux qui ont transgressé le sabbat) ; il s’agit donc d’un langage imagé.
(2:95) « …Ils ne le souhaiteront jamais en raison de ce que leurs mains ont produit » = « en raison de leurs actions », ou « de ce qu’ils ont fait ». Là encore c’est imagé : Les mains représentent leurs actions en général, et pas nécessairement quelque chose qu’ils ont fait avec leurs mains. Une personne peut en effet demander oralement à une autre de faire une action répréhensible par exemple, sans pour autant avoir rien fait de ses mains.
(2:97) « …En vérité, il (Gabriel) l’a (le coran) fait descendre sur ton cœur (le cœur de Mohammed) par la grâce de Dieu, confirmant ce qui était entre ses deux mains (les mains de Gabriel), … », c’est-à-dire « les livres déjà révélés précédemment par l’entremise de Gabriel avant le coran et déjà en sa possession » (et dont les gens du livre disposent); « ce qui était entre ses deux mains » est donc ici une allégorie qui représente les livres spirituellement en sa possession, et non pas des livres physiques littéralement entre ses deux mains.
(2:195) « Et dépensez dans le chemin de Dieu, et ne vous jetez pas avec vos mains vers la destruction… » = « et que vos actions ne vous mènent pas à la destruction ». Ici encore, les mains reflètent les actions des hommes en général et non pas les mains en tant que telles.
(2:255) « …Il sait ce qui est entre leurs deux mains et ce qui est derrière eux… » ; c’est-à-dire « Il connait leurs actions passées et présentes, ainsi que futures (c’est-à-dire les actions qu’ils ne voient pas car elles sont encore « dans leur dos » ou « derrière eux ») ». Une nouvelle fois, « les mains » représentent allégoriquement les actions des hommes.
(3:50) Et confirmant ce qui est entre mes deux mains de la thora… : Cette expression imagée signifie « Et confirmant la thora à laquelle j’ai accès ». Jésus parle ici du fait que l’évangile confirme la thora en général, cette dernière n’étant pas littéralement « entre ses deux mains » au moment où il parle.
(3:73) Dis : « En vérité, la grâce est dans la main de Dieu… » : « La main de Dieu » est une allégorie, et ne signifie très probablement pas que Dieu ait une main comme nous qui sommes des êtres physiques (Dieu est Savant). On peut très simplement traduire la phrase par « En vérité, la grâce appartient à Dieu… ». Comme souvent dans le coran, la main traduit ici le fait de posséder.
(9:67) « et ils ferment leurs mains » = « et ils refusent d’être généreux » : Les mains sont à nouveau imagées, et on imagine les doigts des gens symboliquement crispés sur l’argent et les richesses par avarice. Les mains représentent donc encore ce que les gens possèdent.
(14:9) « …mais ils ont retourné leurs mains dans leurs bouches et ont dit… » : Ceci pourrait être traduit par « mais ils ont fait volte face malgré la vérité qui s’imposait à eux et ont dit …». « Leurs mains » sont donc clairement complètement imagées.
Bien sûr, il y a aussi de nombreux cas où les mains sont à prendre dans un sens purement littéral :
(2:249) « à l’exception de quiconque en prend (c.à.d. de l’eau) dans le creux de sa main » : Ici par contre, il s’agit bien d’une main physique.
(4:43) « …Et essuyez vos visages et vos mains… » Il s’agit ici de faire ses ablutions sèches avec de la terre propre. Les mains sont donc bien physiques et pas imagées. »
Nous avons donc ici prouvé par quelques exemples typiques que « les mains » représentent le souvent « ce que les gens possèdent », « leurs actions », « des personnes » prises dans leur intégralité, etc… de même que les mains dans un sens littéral du terme, même si cela ne représente qu’une minorité de tous les cas (37%).
Nous étudierons très en détail au moment le plus propice (section 7) le verset 5:38 ainsi que les versets du coran liés au fait de « couper les mains » afin d’en dégager l’essence, s’il plaît à Dieu. Mais sachant que la fondation du système judiciaire dans la Bible comme dans le coran est basée sur la loi du talion (loi par équivalence), nous allons d’abord analyser la sentence du voleur au temps de Jacob et de son fils Joseph, ainsi que plus tard lorsque la thora a été révélée.
6. L’une des clefs coraniques pour établir le contexte de la sentence du voleur dans l’histoire de la révélation: L’histoire du frère de Joseph (Benjamin), accusé de vol au royaume d’Egypte, et comparaison avec la loi de la thora
Etudions les versets de la sourate 12 (Joseph):
(12:70) Ensuite, quand il leur eut fourni leurs provisions, il mit la coupe dans le sac de son frère (c’est à dire Benjamin). Plus tard, un porte parole cria : « Ô vous dans la caravane, vous êtes en vérité des voleurs ! ». (17:71) Ils (les frères de Joseph) répondirent en se tournant vers eux : « Qu’est ce qui vous manque ? ». (12:72) Ils répondirent : « Il nous manque la coupe du roi, et quiconque me l’amène recevra la charge d’un chameau, et je m’en porte garant ». (17:73) Ils dirent [alors] : Par Dieu, vous savez très bien que nous ne sommes pas venus pour causer le trouble dans le pays ! Nous ne sommes pas des voleurs ! » (12:74) Ils (les égyptiens) continuèrent: « Alors, quelle sera le châtiment si vous êtes des menteurs ? ». (12:75) Ils (les frères de Joseph) répondirent : « Le châtiment de celui du sac dans lequel elle sera trouvé, c’est lui [même] qui sera la récompense. C’est ainsi que nous (c’est-à-dire nous le peuple juif dans notre pays) récompensons les malfaiteurs. (12:76) Il commença alors par leurs sacs, avant le sac de son frère ; ensuite, il la sorti (c.à.d. la coupe du roi) du sac de son frère. Ainsi avons-Nous forgé notre stratagème avec Joseph. Il ne pouvait pas prendre son frère d’après la loi du roi (parce qu’elle était différente de celle du peuple juif), si ce n’est par la volonté de Dieu. Nous élevons par degrés qui Nous voulons, mais au dessus de toute personne qui possède le savoir se trouve l’Omniscient.
Tout d’abord, Joseph était doué d’une très grande intelligence et il convient de noter que le fait qu’il ait choisi de prétendre que c’était « la coupe du roi » qui avait été volée était très probablement du à sa grande valeur (les égyptiens proposent même de donner une pleine charge de chameau à quiconque se proposerait de la ramener, ce qui augmentent considérablement sa valeur dans l’esprit des frères de Joseph d’un point de vue psychologique), doublé du fait de sa valeur prestigieuse et de l’autorité attachée à son propriétaire. Nous ne sommes pas sûrs de tous les détails de la loi israélite en matière de vol (le châtiment était-il le même si on volait une pomme ou un bien ou objet de grande valeur ?) ; la seule chose dont nous sommes certains dans ce passage est que le châtiment pour un vol très substantiel du temps de Joseph (bien avant la révélation de la thora) était une peine d’une extrême sévérité puisque que le voleur perdait sa liberté, c’est-à-dire qu’il devenait la propriété de la personne à qui il avait volé.
La loi de la thora révélée environ 300 ans plus tard au temps de Moïse est similaire, et peut être même identique car l’histoire de Joseph ne traite que du vol d’un objet de grande valeur.
Exode 22 :
(Exode 22:3) [Mais] si le soleil est levé sur lui, il sera coupable de meurtre. Il fera donc une entière restitution; [et] s’il n’a de quoi, il sera vendu pour son larcin.
(Exode 22:4) S’il a volé un animal – bœuf, âne ou mouton – et qu’on le retrouve vivant en sa possession, il rendra deux animaux en compensation.
Ce que je comprends ici est que le voleur doit restituer l’animal volé (et vivant) ainsi qu’un deuxième animal équivalent en valeur à celui volé.
(Exode 22:6) Si un homme confie à la garde d’autrui de l’argent ou des objets de valeur et qu’ils soient volés dans la maison de celui qui en avait accepté la garde, si le voleur est retrouvé, il restituera le double de ce qu’il a volé.
(Exode 22:8) Dans toute affaire frauduleuse, qu’il s’agisse d’un bœuf, d’un âne, d’un mouton, d’un vêtement ou de n’importe quel objet perdu dont deux personnes revendiqueront la propriété, les deux parties porteront le litige devant Dieu ; celui que Dieu déclarera coupable restituera le double à l’autre.
L’indemnité en question est donc que le voleur doit restituer deux fois la valeur de ce qu’il a volé (versets 3, 6 et 8), à savoir tout d’abord le bien volé qui ne lui appartient pas ou son équivalent si le bien a été dilapidé ou endommagé, ainsi qu’une pénalité équivalente au bien volé lui-même. Il s’agit donc bien ici du principe de la loi du talion ou loi par équivalence (…L’âme en échange de l’âme, œil pour œil, nez pour nez, oreille pour oreille, dent pour dent,…).
A défaut, et si le voleur ne peut faire face à la peine encourue, il perd sa liberté et devient esclave (Exode 22:2), exactement comme la loi des israélites en matière de vol dont il est fait référence dans la sourate Joseph.
Nous allons voir dans la section suivante que le vrai sens de l’expression coranique « couper les mains » des voleurs consiste non pas à leur couper littéralement les mains, mais est en fait une expression imagée très typique de l’utilisation du verbe « qouti’a » dans le coran, à savoir qu’on « coupe/divise ce que possèdent » les voleurs (c.à.d. ce que leurs mains possèdent) pour indemniser la partie lésée, et alternativement (s’ils n’ont pas les moyens) on les « coupe/prive du fruit du travail de leurs mains », c’est-à-dire qu’ils perdent leur liberté (provisoirement ou définitivement dans des cas extrêmes) jusqu’à tant que la loi du talion ait été réalisée et que le propriétaire du bien volé ait été compensé.
7. Le châtiment coranique en cas de vol
7.1 Le verset 5:38 et son contexte
L’une des graves erreurs d’interprétation du verset 5:38 est de le séparer de son contexte ; voilà pourquoi nous citons ici les versets 5:28-45, qui finissent en apothéose avec la loi du talion:
(5:28) Si tu (Caïn) étends ta main pour me (Abel) tuer, je n’étendrai pas ma main pour te tuer. En vérité, je crains Dieu, le Seigneur de l’univers. (5:29) Vraiment, je prie que tu encoures mes péchés et tes péchés, afin que tu sois du nombre des compagnons du feu ; telle est la récompense des gens malfaisants. (5:30) Son âme lui insuffla alors de tuer son frère ; Il le tua, et devint du nombre des perdants. (5:31) Dieu envoya alors un corbeau ; il gratta la terre pour lui montrer comment couvrir le corps défunt de son frère, Il s’écria : « Malheur à moi ! Je ne suis [même] pas capable de faire comme ce corbeau et de couvrir le corps défunt de mon frère ! Et il devint couvert de remords. (5:32) Depuis lors, nous avons prescrit aux enfants d’Israël que quiconque tue une personne, à moins qu’elle ne soit coupable de meurtre ou ne sème la corruption sur la terre, équivaut à tuer l’humanité toute entière. Et quiconque sauve une âme, c’est comme s’il sauvait l’humanité toute entière. En vérité, nos messagers leur sont parvenus avec des preuves (irréfutables). Mais beaucoup d’entre eux ont par la suite (décidé) de commettre le mal sur terre.
إِنَّمَا جَزَاءُ الَّذِينَ يُحَارِبُونَ اللَّهَ وَرَسُولَهُ وَيَسْعَوْنَ فِي
الْأَرْضِ فَسَادًا أَن يُقَتَّلُوا أَوْ يُصَلَّبُوا أَوْ تُقَطَّعَ أَيْدِيهِمْ
وَأَرْجُلُهُم مِّنْ خِلَافٍ أَوْ يُنفَوْا مِنَ الْأَرْضِ ذَٰلِكَ لَهُمْ
خِزْيٌ فِي الدُّنْيَا وَلَهُمْ فِي الْآخِرَةِ عَذَابٌ عَظِيمٌ
(5:33) La seule récompense de ceux qui combattent Dieu et Son messager et s’acharnent à corrompre la terre est d’être tué ou crucifié, ou de couper (تُقَطَّعَ = verbe à la forme 2) leurs mains et leurs pieds à l’opposé, ou d’être exilés du pays. Telle est la disgrâce qu’ils encourent en ce monde et ils encourront un châtiment immense dans l’au-delà. (5:34) Sauf ceux qui se repentent avant que vous ne les arrêtiez, Dieu est enclin au pardon, Miséricordieux. (5:35) Ô vous qui croyez, craignez Dieu, recherchez la voie qui mène à Lui, et luttez dans Son chemin, afin que vous connaissiez le succès. (5:36) Certes, ceux qui mécroient, si tout ce qui est sur la terre leur appartenait, doublé de l’équivalent, pour leur servir de rançon en échange du jour de la résurrection, cela ne serait point accepté de leur part, et un châtiment douloureux leur est réservé. (5:37) Ils voudront pouvoir sortir du feu, mais ils n’en sortiront pas, et ils encourront un châtiment durable.
وَالسَّارِقُ وَالسَّارِقَةُ فَاقْطَعُوا أَيْدِيَهُمَا جَزَاءً
بِمَا كَسَبَا نَكَالًا مِّنَ اللَّهِ وَاللَّهُ عَزِيزٌ حَكِيمٌ
(5:38) Et [pour ce qui est] du voleur et de la voleuse, prélevez (فَاقْطَعُوا = verbe à la forme 1 = couper ou diviser symboliquement) [le fruit de] leurs mains en rétribution équivalente à ce qu’ils ont acquis : [Voici] un châtiment exemplaire de la part de Dieu ! Dieu est Puissant et Sage. (5:39) Mais quiconque se repent suite à son forfait, et se réforme, alors, en vérité, Dieu lui accordera [Sa] repentance. En vérité, Dieu est enclin au pardon, miséricordieux. (5:40) Ne sais-tu pas que c’est à Dieu qu’appartient le royaume des cieux et de la terre ? Il punit qui Il veut, et Il pardonne à qui Il veut. Dieu exerce un contrôle absolu sur toutes choses. (5:41) Ô messager ! Ne sois pas attristé par ceux qui s’empressent vers la mécréance, et parmi lesquels ont dit : « Nous croyons », avec leurs bouches, mais qui ne croient pas avec leurs cœurs ; et parmi ceux qui sont juifs, il y a ceux qui prêtent oreille au mensonge, et écoutent un autre peuple qui n’est pas venu à toi. Ils déforment les paroles au delà de son contexte [coranique]. Ils disent : « Si on te donne ceci, prends-le, mais si on ne te le donne pas, alors tiens-toi sur tes gardes. » Et quiconque Dieu désire mettre à l’épreuve, tu n’auras pas la moindre influence sur lui face à [la volonté de] Dieu. Tels sont ceux dont Dieu n’a pas l’intention de purifier les cœurs. La disgrâce leur est réservée dans ce monde, et un châtiment terrible leur est réservé dans l’au delà. (5:42) Ceux qui prêtent oreille au mensonge et consomment ce qui est illicite. Alors, s’ils viennent te consulter, juge donc entre eux, ou détourne-toi d’eux, et si tu te détournes d’eux, ils ne pourront alors aucunement te nuire. Et si tu [fais office de] juge, alors juge entre eux en toute équité. En vérité, Dieu aime ceux qui sont équitables. (5:43) Mais comment peuvent-ils te désigner comme juge alors qu’ils ont en leur possession la thora qui contient le(s) commandement(s) de Dieu ?! Ensuite, après cela, ils se détournent ; ils ne sont pas du nombre des croyants. (5:44) En vérité, nous avons révélé la thora, laquelle fait office de guide et de lumière, Les prophètes ont jugé par son intermédiaire ceux qui se sont soumis parmi ceux qui sont juifs, les rabbins et les érudits, grâce à ce qui leur avait été confié du livre de Dieu, et ils étaient témoins à ce sujet. Alors ne crains pas les gens, mais crains-moi ! Et ne troque pas mes versets à petit prix, et quiconque ne juge point en fonction de ce que Dieu a révélé, alors voilà ceux qui sont mécréants ! (5:45) Et Nous y avons ordonné à leur égard : L’âme en échange de l’âme, œil pour œil, nez pour nez, oreille pour oreille, dent pour dent, et la loi du talion s’applique aux blessures ; mais quiconque fait preuve de charité au lieu de cela, il s’agit alors d’une expiation en sa faveur. Et quiconque ne juge pas en fonction de ce que Dieu a révélé : Tels sont ceux qui sont qui sont malfaisants.
7.2 La différence contextuelle et le contraste significatif entre les verbes qouti’a (5:38, forme 1) et Qata’a (5:33, forme 2)
Toute personne sincère qui étudie le coran ne peut être qu’émerveillée par la précision absolue des mots coraniques, à savoir que le moindre détail est lourd de signification. La première chose qui me saute aux yeux dans les versets ci-dessus est que la racine « qata’a » (قطع) est employée deux fois en relation avec « les mains » (5:33 et 5:38). Il est très clair en 5:33 que l’un des châtiments coraniques possibles pour les gens qui « combattent Dieu et Son messager et sèment la corruption sur la terre » (c’est à dire l’équivalent de tueurs en séries) est que leurs mains et leurs pieds soient « coupés » (c’est-à-dire« amputés ») (تُقَطَّعَ أَيْدِيهِمْ = le verbe est à la forme 2) « à l’opposé » pour les humilier et limiter leur capacité de continuer à perpétrer des massacres autour d’eux à l’avenir. Par contre,Dieu a très pertinemment choisi, et par contraste avec 5:33, que ce soit le verbe à la forme 1 (فَاقْطَعُوا) – et toujours en relation avec « les mains » (أَيْدِيَهُمَا) – qui soit employé en 5:38 pour le châtiment des voleurs. Nous citerons ci-dessous quelques exemples qui illustrent la variation du sens des verbes selon qu’ils soient à la forme 1 ou la forme 2 dans le coran:

Ceci pour souligner que c’est un véritable lieu commun que de dire que le sens d’un verbe à la forme 1 est très souvent différent de celui à la forme 2, et c’est dans notre cas une évidence absolue car les deux verbes (قُطِعَ et قَطَّعَ) sont employés dans la même section et contexte coranique (5:33 et 5:38) et dans les deux cas avec le même mot « main » comme complément d’objet direct ! Puisque le premier verbe à la forme 2 (5:33) veut indéniablement dire « couper » dans le sens d’« amputer », le second verbe à la forme 1 (5:38) au sujet du châtiment du voleur signifie obligatoirement autre chose.
En 7:124 et 20:71, Pharaon menace de « couper les mains et les pieds » des magiciens qui ont professé leur foi en Dieu suite au profond miracle du serpent qui a dévoré leurs tours de magie, et c’est très logiquement la forme 2 (قَطَّعَ = qata’a) qui est employée pour le verbe « couper » (comme en 5:33), car il s’agit bien « d’amputer la main » et non pas d’un emploi typiquement imagé du verbe à la forme 1 (tel qu’étudié en détail en section 4) comme c’est le cas en 5:38.
7.3 Analyse précise du verset 5:38
Focalisons-nous maintenant sur le verset 5:38 suivi de sa traduction :
وَالسَّارِقُ وَالسَّارِقَةُ فَاقْطَعُوا أَيْدِيَهُمَا جَزَاءً
بِمَا كَسَبَا نَكَالًا مِّنَ اللَّهِ وَاللَّهُ عَزِيزٌ حَكِيمٌ
(5:38) Et [pour ce qui est] du voleur et de la voleuse, coupez/divisez/prélevez (اقْطَعُوا = verbe à la forme 1 = coupez symboliquement) [le fruit de] leurs mains (« les mains » font très souvent référence de façon imagée aux « possessions » des gens ou à leurs « biens » dans le coran, voir section 5) en rétribution équivalente à ce qu’ils ont acquis : [Voici] un châtiment exemplaire de la part de Dieu ! Dieu est Puissant et Sage.
– « Leurs mains » signifient ici « ce que les voleurs possèdent », ce qui est un emploi imagé fréquent « des mains » dans le coran comme étudié dans la section 5. On peut également établir une comparaison par exemple avec le verset 9:67, où les gens « ferment/crispent leurs mains » (verbe à la forme 1 comme « qouti’a » en 5:38), ce qui est une métaphore pour traduire leur avarice : Un verbe donné (couper, fermer etc…) suivi de « leurs mains » peut tout à fait être allégorique et non littéral.
Dieu aurait simplement pu dire « coupez leurs mains », mais il dit en fait très précisément qu’il faut « couper leurs mains en rétribution équivalente (جَزَاءً = jazaan) à ce qu’ils ont acquis ».
– La racine jazaya (جزي) signifie « récompenser », « servir de substitut », « payer » (une dette), « satisfaire quelqu’un », « donner l’équivalent ».
– La définition du mot « jazâ » (جَزَآء) est « rétribution », « récompense », « compensation », « équivalent », « satisfaction ».
Compte tenu de la loi du talion qui régit la loi coranique et qui est très pertinemment citée à peine quelques versets après la sentence du voleur en 5:45 (!), j’ai traduit le passage et le mot « jazâan » par « coupez/divisez/prélevez [le fruit de] leurs mains (leur travail ou leurs biens) en rétribution équivalente à ce qu’ils ont acquis », car la loi en matière de vol est une rétribution/sanction à l’encontre du voleur basée sur « l’équivalence », c’est-à-dire proportionnelle au délit commis. Cette rétribution implique par pure logique que les biens qui sont « coupés » selon la loi du talion doivent compenser la partie lésée, et on peut tout à fait faire le rapprochement avec la loi de la thora.
Le bien volé (ou son équivalent si le bien a été dilapidé ou endommagé) doit par définition être restitué à son propriétaire légitime (les versets du livre de l’exode sont à nouveau cités ci-dessous à titre de comparaison avec la loi en 5:38). En plus de cela une « rétribution équivalente » doit être versée à la partie lésée, ce qui est le résultat du fait que les biens du voleur (ou sa capacité de travailler) doivent donc être ponctionnés ou prélevés (coupés symboliquement), c’est-à-dire qu’il est tenu de surcroît de payer une amende équivalente au bien volé. Ma traduction de « jazâan » combine deux traductions possibles du mot (« rétribution » et « équivalent ») car il s’agit de rétribuer/sanctionner (et de compenser) dans le contexte de la loi du talion édictée en 5:45.
Dans le cas de vol de biens ou de sommes vraiment exorbitantes (imaginons un dictateur ou un roi qui a considéré que le pays qu’il gouvernait lui appartenait et a puisé dans les ressources de son pays à des fins personnelles au lieu de servir son peuple) et s’il s’avère que le voleur ne pourra jamais restituer les biens volés et payer en plus une amende représentant l’équivalent, une telle sentence peut signifier perdre sa liberté de façon définitive (emprisonnement ou bagne à perpétuité par exemple) car la punition est proportionnelle au crime commis. Une sentence de perte de liberté peut bien sûr être également temporaire, par exemple en forçant une personne à travailler en ne percevant aucun salaire jusqu’à tant qu’il ou elle répare les dommages commis et paie la compensation équivalente à la partie lésée. La justice coranique est dure et juste. Nous retrouvons donc ici un système similaire à celui de la thora et de la sourate Joseph étudié dans la section précédente:
(Exode 22:3) [Mais] si le soleil est levé sur lui, il sera coupable de meurtre. Il fera donc une entière restitution; [et] s’il n’a de quoi, il sera vendu pour son larcin.
(Exode 22:4) S’il a volé un animal – bœuf, âne ou mouton – et qu’on le retrouve vivant en sa possession, il rendra deux animaux en compensation.
(Exode 22:6) Si un homme confie à la garde d’autrui de l’argent ou des objets de valeur et qu’ils soient volés dans la maison de celui qui en avait accepté la garde, si le voleur est retrouvé, il restituera le double de ce qu’il a volé.
(Exode 22:8) Dans toute affaire frauduleuse, qu’il s’agisse d’un bœuf, d’un âne, d’un mouton, d’un vêtement ou de n’importe quel objet perdu dont deux personnes revendiqueront la propriété, les deux parties porteront le litige devant Dieu ; celui que Dieu déclarera coupable restituera le double à l’autre.
Remarque : Dieu s’adresse au sujet des juifs en 5:43, peu après le verset au sujet du châtiment pour vol (5:38) :
(5:43) Mais comment peuvent-ils te (Mohammed) désigner comme juge alors qu’ils ont en leur possession la thora qui contient le(s) commandement(s) de Dieu ?! …
On peut légitimement se demander si les juifs venaient consulter le saint prophète pour des affaires de vol ; Dieu s’indignant qu’ils aient même besoin de le consulter car la loi de Dieu est clairement édictée dans la Thora.
A la lumière de la thora, le châtiment pour vol n’a jamais été de trancher la main du voleur, et encore moins sans faire aucune distinction entre voler un œuf ou une pomme, une voiture ou quelque chose de beaucoup plus substantiel (ce qui correspondrait bien évidemment à l’exact contraire de la loi du talion). Il s’agit de « couper/diviser/prélever sur ses biens » pour compenser le vol par équivalence. En d’autres termes, et lorsqu’on place 5:38 dans le contexte précis de la sourate 5 et dans le contexte élargi du coran, on ne coupe jamais la main du voleur.
Remarque : La loi sunnite et chiite basée sur la loi de la justice aveugle (l’anti loi du talion) préconise de couper une main au voleur, et l’expression purement littérale en 5:38 est de « couper les mains des deux voleurs (فَاقْطَعُوا أَيْدِيَهُمَا : « Mains » est au pluriel (3 ou + en arabe), suivi du pronom au duel qui désigne le voleur et la voleuse) : Si on se voilait la face et ignorait le sens obligatoirement imagé du verset (contraste profondément significatif entre Qata’a, 5:33, forme 2, et qouti’a, 5:38, forme 1), il faudrait couper les deux mains à chaque voleur ; les sunnites et les chiites qui ne comprennent pas le sens clairement imagé du verset ne sont donc pas non plus capables d’en comprendre le sens littéral, ce qui prouve à quel point ils sont en total décalage à tous points de vue avec le coran à cause de l’influence néfaste des hadiths autres que Dieu et Ses versets (45:6) ayant trait au vol, qui sont d’ailleurs cités dans la section suivante.
Le but du châtiment coranique en matière de vol est donc de réparer et dédommager la partie lésée par l’intermédiaire d’une punition ferme et mesurée et non pas d’amputer, ce qui rendrait une personne partiellement infirme, peut être incapable de gagner honnêtement sa vie et potentiellement dépendante de la société pour le restant de son existence. De plus, si la punition entendue dans le verset était vraiment d’amputer comme le prétendent les sunnites et shiites corrompus, cela impliquerait que 5:38 ne détaillerait ni ne prévoirait aucun dédommagement à la partie lésée dans le verset, ce qui impliquerait que le coran n’est pas pleinement détaillé. Comprendre que « couper leurs mains en rétribution équivalente (par équivalence) à ce qu’ils ont acquis » est imagé et signifie « prélevez leurs biens ou leur capacité à travailler en rétribution équivalente à ce qu’ils ont acquis » combine au contraire à la fois une sentence juste et implique une restitution et compensation pour la partie lésée (comme la loi de la thora). Même si par quelque justice macabre on donnait une main amputée en trophée à la partie lésée, cela ne réparerait jamais aucun dommage causé, contrairement au fait « de couper/prélever leurs mains (c’est-à-dire ce que possède les voleurs) en rétribution équivalenteà ce qu’ils ont acquis » (c’est-à-dire qu’ils doivent rendre ce qui est volé, plus une compensation équivalente).
7.4 5:39-40 : Le pardon fait suite à la sentence :
فَمَن تَابَ مِن بَعْدِ ظُلْمِهِ وَأَصْلَحَ فَإِنَّ
اللَّهَ يَتُوبُ عَلَيْهِ إِنَّ اللَّهَ غَفُورٌ رَّحِيمٌ
(5:39) Mais quiconque se repent suite à son forfait, et se réforme, alors, en vérité, Dieu lui accordera [Sa] repentance. En vérité, Dieu est enclin au pardon, miséricordieux.
أَلَمْ تَعْلَمْ أَنَّ اللَّهَ لَهُ مُلْكُ السَّمَاوَاتِ وَالْأَرْضِ يُعَذِّبُ
مَن يَشَاءُ وَيَغْفِرُ لِمَن يَشَاءُ وَاللَّهُ عَلَىٰ كُلِّ شَيْءٍ قَدِيرٌ
(5:40) Ne sais-tu pas que c’est à Dieu qu’appartient le royaume des cieux et de la terre ? Il punit qui Il veut, et Il pardonne à qui Il veut. Dieu exerce un contrôle absolu sur toutes choses.
La miséricorde de Dieu est omniprésente dans le coran et nous apprenons immédiatement après 5:38 (5:39-40) que Dieu peut malgré tout « pardonner » aux voleurs, ce qui signifie explicitement dans le contexte de 50:40 le contraire de les « punir » (autrement dit « annuler une punition »), s’ils répondent à deux conditions :
1. Le voleur doit se repentir.
2. Le voleur doit se réformer.
Le verset 5:40 précise donc que la sentence peut potentiellement être levée à un moment donné si le voleur se repent (par exemple en prêtant serment qu’il ne récidivera pas devant les personnes lésées et/ou une cour de justice) et se réforme. « Se réformer » indique à mon sens qu’il s’agit de prouver sa bonne foi par des actes et pas seulement des mots : Par exemple, le voleur ne se contentera que de restituer les biens volés ou l’équivalent, mais devra effectuer des travaux d’intérêt général au lieu de payer une amende équivalente aux biens volés.
La mise en place d’un tel système de pardon peut se faire en s’inspirant du fait que c’est la famille du défunt qui, en cas de meurtre a le pouvoir de pardon en échange d’un prix du sang (2:178) : On peut demander aux parties lésées si elles veulent bien accorder leur clémence en renonçant à percevoir l’amende qui leur est due. A partir de là, il est possible que les voleur se réforme en faisant des travaux d’intérêt général à la place (par exemple), et en proportion avec la gravité du délit. En tous les cas, si on peut potentiellement pardonner à un meurtrier (5:32 :…quiconque tue une personne, à moins qu’elle ne soit coupable de meurtre ou sème la corruption sur la terre, équivaut à tuer l’humanité toute entière…), il n’y a aucune raison de ne pas potentiellement pardonner à un voleur.
Il est donc parfaitement clair que si le voleur est arrêté, mais se repent sincèrement et se réforme, il peut dans certaines conditions bénéficier du pardon divin.
Si les sommes ou les bien dérobés, dilapidés et non restitués sont beaucoup trop important pour être jamais restitués en totalité (par exemple un dictateur qui s’approprierait et dilapiderait les ressources de son pays, ou un escroc du type Bernard Madoff, le tout correspondant à une somme colossale impossible à rembourser), le voleur ne peut pas même pas accomplir le strict minimum qui est de réparer le dommage causé et la sentence (par exemple le bagne à perpétuité) doit à mon avis être incompressible, à moins que toutes les personnes lésées ne soient malgré tout d’accord d’accorder le pardon, ce qui est virtuellement impossible dans les cas extrêmes.
8. La corruption des hadiths
Les hadiths autres que Dieu et Ses versets (45:6) ne font pas la différence entre le verbe Qata’a (قَطَّعَ, 5:33 forme 2 = couper/amputer) et le verbe qouti’a (قُطِعَ, 5:38, forme 1 = couper de façon imagée) comme dans la sourate 5 et préconisent d’amputer la main au voleur, même pour des vols mineurs (voir les hadiths vraiment choquants de Muslim ci-dessous):
Sahih Bukhari 5:59:597 :
Rapporté par ‘Ourwa Az-Zoubair: Une femme avait commis un vol pendant l’existence de l’apôtre d’Allah lors du Ghazwa d’Al-Fath (la conquête de La Mecque). Ses proches allèrent voir Oussama bin Zaid pour intercéder en sa faveur (auprès du prophète). Quand Oussama intercéda en sa faveur auprès de l’apôtre de Dieu, le visage de l’envoyé de Dieu changea de couleur et il s’écria : « Intercède-tu auprès de moi au sujet d’une question impliquant l’un des châtiments légaux prescrit par dieu ?! » Oussama répliqua : Ô envoyé d’Allah, demande pardon à Dieu en ma faveur. Alors, dans l’après midi, l’envoyé de Dieu se leva et s’adressa au peuple. Il rendit louange à Dieu comme Il le mérite, et dit alors ; « Amma ba’du ! Les nations avant vous ont été détruites parce que quand un noble parmi eux volait, ils l’excusait, et quand un pauvre parmi eux volait, ils lui appliquaient la peine légale (de Dieu). Par Celui entre les mains duquel se trouve l’âme de Mohammed, si Fatima, la fille de Mohammed volait, je lui amputerais la main ». L’envoyé de Dieu décréta alors son ordre au sujet du cas de cette femme, et sa main fut amputée. Ensuite, son repentir s’avéra être sincère et elle se maria, ‘Aicha dit : « Cette femme avait l’habitude de venir me voir et je transmettais ses questions à l’envoyé de Dieu ».
Sahih Muslim 17:4190 :
Jaibir rapporta qu’une femme de la tribu de Makhzoum avait commis un vol. Elle fut amenée en présence de l’envoyé de Dieu (que la paix soit sur lui) et elle chercha refuge auprès de Oum Salama, la femme de l’envoyé de Dieu (que la paix soit sur lui). L’envoyé de Dieu (que la paix soit sur lui) dit alors : « Par Dieu ! Même s’il s’agissait de Fatima, je lui ferais amputer la main ! Et alors, sa main fut amputée.
Sahih Muslim 17:4183 :
Ibn ‘Umar a rapporté que le messager de Dieu (que la paix soit sur lui) a amputé la main d’un voleur (dans le cas du vol) d’un bouclier d’une valeur de trois dirhams.
Sahih Muslim 17:4185 :
Abou Houraira a rapporté que le messager de Dieu (que la paix soit sur lui) a dit : « Que la malédiction de Dieu s’abatte sur le voleur qui vole un œuf et à qui on ampute la main, et qui vole une corde et à qui on ampute la main ».
Couper la main d’une personne qui vole un œuf ou une corde ?! Et bien, c’est du joli la loi sunnite basée sur les hadiths autres que Dieu et Ses versets (45:6). Quelle est donc le lien entre ces hadiths et la loi du talion, fondation de la loi coranique basée sur l’équivalence ? Aucun bien sûr. Les hadiths sont donc une fois de plus la racine du mal qui ronge le monde musulman et nous sommes ici bien au contraire témoins d’une profanation de la loi du talion (5:45) au profit d’une justice extra-coranique aveugle (les hadiths), profondément inhumaine, catastrophiquement démesurée et injuste. Nous sommes aux antipodes du message de miséricorde du coran et du vrai message exprimé en 5:38-40 et que nous avons analysé.
Dieu nous alerte dans les termes les plus véhéments au sujet de ceux qui jugent en suivant des lois autres que celles du livre de Dieu (hadiths):
(5:44) …et quiconque ne juge point en fonction de ce que Dieu a révélé (le coran), alors voilà ceux qui sont mécréants !
Rappelons-nous que la loi du talion (basée sur l’équivalence) est mentionnée dans le verset suivant (5:45). Couper la main, c’est la loi des hadiths, pas celle du coran.
Conclusion
– La loi de Dieu, c’est la loi du talion, basée sur l’équité et l’équivalence. Elle régit tout le système judicaire, y compris bien sûr la sentence en cas de vol : Il s’agit donc d’établir un châtiment juste proportionné à chaque délit commis.
– Le verset 5:38 décrit la sentence des voleurs et parle de « couper leurs mains en rétribution équivalente à ce qu’ils ont acquis ».
– Le verbe « couper » (qouti’a) est à la forme 1, et une étude des 12 emplois de ce verbe dans le coran démontre que dans 83% des cas (y compris 5:38), le sens du verbe « couper » est imagé et ne signifie pas « couper » dans un sens littéral.
– De plus, nous avons trouvé que dans environ 63% des cas (76 fois sur 120), le mot « main » est également imagé et est souvent lié au fait de posséder quelque chose.
– La véritable clef pour comprendre la signification du verset 5:38 et la sentence du voleur est d’étudier le contexte immédiat de la sourate 5 et d’être conscient de l’alternance cruciale entre le verbe « qouti’a » (5:38, forme 1) et le verbe « Qata’a » (5:33, forme 2). Le verbe Qata’a (forme 2) est associé au mot « main » en 5:33 et l’association de ces deux mots apparait six fois dans le coran (5:33, 7:124, 12:31, 12:50, 20:71, 26:49) et signifie toujours littéralement « couper » la ou les mains dans un sens littéral et physique, même si le verbe signifie simplement « taillader » (et non trancher) les mains en 12:31 et 12:50. En 5:38 c’est par contre le verbe « qouti’a » (forme 1) qui est associée au mot « leurs mains », et c’est la seule fois qu’on trouve l’association des deux mots dans le coran. Compte tenu du fait de l’alternance significative des verbes à la forme 1 et à la forme 2 dans un contexte proche (5:33 et 5:38), il est tout simplement impossible que le verbe « qouti’a » (forme 1) en 5:38 ait la même signification que la forme 2 en 5:33 et doit donc être pris dans un sens figuré, ce qui de toute façon ne fait que confirmer son usage imagé dans 83% des cas dans l’ensemble du coran.
Il s’agit donc de « couper//prélever (اقْطَعُوا = verbe à la forme 1 = couper symboliquement) [le fruit de] leurs mains (c’est-à-dire symboliquement « ce qu’ils possèdent » ou « leur capacité de travail ») en rétribution équivalente à ce qu’ils ont acquis… » (5:38).
On ne coupe jamais la main littéralement au voleur d’après le coran ; au contraire, on le punit proportionnellement à ce qu’il a volé (loi du talion).
– Le bien volé (ou son équivalent si le bien a été dilapidé) doit par définition être restitué à son propriétaire ; le message de 5:38 est donc qu’en plus de cela les biens du voleur (ou sa capacité de travailler librement) doivent être ponctionnés ou prélevés (coupés symboliquement) en rétribution équivalente à ce que le voleur a acquis », c’est-à-dire qu’il est tenu de surcroît de payer une amende équivalente au bien volé.
– Cette sentence juste rejoint très exactement celle de la bible (Exode 22:2, 22:6, 22:8) ou le voleur doit restituer le bien volé, doublé d’une amende qui représente son équivalent ou à défaut en payer le double.
– La sourate 12 montre d’autre part que chez les hébreux au temps de Joseph, et au minimum dans un cas où le voleur ne pouvait payer de compensation, il perdait sa liberté, ce qui confirme également le livre de l’exode (22:2), et que de nos jours, si un voleur ne peut réparer financièrement, « on lui coupe [le fruit] ses mains » (c’est-à-dire sa liberté de gagner de l’argent) dans le sens qu’il encoure par exemple une peine de prison ou de bagne jusqu’à tant qu’il puisse honorer la sentence. Le respect de la propriété d’autrui est l’une des pierres d’achoppement de la société musulmane pour garantir la paix civile et la sentence pour vol est tout sauf une plaisanterie.
– En plus d’une sentence mesurée et proportionnelle au vol commis, les versets 5:39-40 montrent qu’un voleur peut être pardonné une fois qu’il « se repent et se réforme », ce qui demande de prêter serment et d’accomplir des actions concrètes pour prouver qu’il mérite le pardon. Il est n’est donc pas impossible que même un voleur qui aurait été condamné à perpétuité puisse malgré tout être pardonné à un moment donné, ce qui correspond tout à fait au message de miséricorde omniprésent dans le coran.
– Les hadiths autres que Dieu et Ses versets (45:6) préconisent bien sûr l’amputation pure et simple, et même pour des vols carrément mineurs (un œuf, une corde, cf. Muslim 17:4185). Ceci démontre une nouvelle fois le décalage monstrueux entre le message mesuré et miséricordieux du livre de Dieu et ses sentences proportionnelles au délit commis, et les lois d’origine sataniques qui ont corrompus la religion de Dieu et qui sont l’antithèse absolue de la loi du talion.
Beaucoup de gens se demanderont pourquoi Dieu a autorisé une possible ambigüité par rapport à la sentence du voleur. En fait, et comme on l’a vu, il n’y a aucune ambiguïté lorsqu’on étudie de près la sourate 5 ; mais il est vrai que le coran est un test et qu’il agit comme un révélateur : L’âme mauvaise se laissera guider vers le chemin de l’obscurité, et l’âme pure sera guidée vers la lumière, et en l’occurrence vers une justice mesurée, miséricordieuse et humaine.
Disons-le encore : Quelque soit le cas de figure, on ne coupe JAMAIS la main au voleur selon le saint coran, et seuls les impies se livrent à de telles atrocités.